Dix ONG demandent à la Commission européenne de suspendre les exportations d’animaux vers Israël

Welfarm et neuf autres organisations de protection animale ont adressé un courrier à la commissaire européenne à la Santé, l’exhortant à suspendre les exportations d’animaux vivants à destination d’Israël jusqu’à la fin des hostilités dans la région.

Bétaillère maritime
Photo d’illustration. ©Stockstudio

Depuis octobre 2023, le conflit au Proche-Orient a fait des milliers de victimes civiles dans la région. Une situation humanitaire dramatique qui nous indigne, mais qui ne doit pas faire oublier que les animaux d’élevage, eux-aussi, sont des victimes collatérales des combats.

Dix organisations européennes de protection animale, dont Welfarm, ont adressé le 23 octobre 2023 un courrier à la commissaire européenne à la Santé, Stella Kyriakides, afin de lui demander de suspendre les exportations d’animaux vivants à destination d’Israël en raison des risques encourus par les animaux dans ce pays.

Alors que le conflit s’intensifie, de nombreux bovins et ovins continuent d’être exportés depuis l’Union européenne (UE) vers le port d’Haïfa, en Israël. Des cargaisons d’animaux vivants en provenance de Croatie, de France, de Hongrie, d’Irlande, de Lituanie, du Portugal, ou encore de Roumanie.

Les chiffres pour 2024 ne sont pas encore arrêtés, mais, en 2023, la France a par exemple exporté 13 196 agneaux de moins d’un an vers Israël. Selon Eurogroup for animals, en 2024, 107 expéditions d’animaux vivants en provenance de pays de l’UE sont arrivées par voie maritime dans l’État hébreu.

Risques multiples pour les animaux exportés vers Israël

Ces exportations posent problème car la situation sur place fait courir de nombreux risques en matière de bien-être animal. Des contacts ont informé les ONG que le port de Haïfa est sous tirs de roquettes continus, avec deux ou trois attaques quotidiennes. Bien que ces roquettes soient interceptées, les explosions assourdissantes terrifient les animaux présents sur le port, de même que les sirènes d’alerte déclenchées par ces attaques.

Les travailleurs et manutentionnaires du port, nerveux, traitent les animaux plus brutalement que d’habitude pour accélérer le déchargement, notamment en utilisant plus fréquemment des aiguillons électriques.

Après ces déchargements violents, les animaux sont transportés vers un centre de quarantaine où ils restent pendant huit jours. Ces centres sont également exposés à des tirs quotidiens, à tel point que des habitants de la région ont dû évacuer. Après la quarantaine, les animaux sont transférés vers des fermes d’engraissement, qui peuvent également être situées dans des zones à risque.

Possible non-respect du droit européen

Il est inacceptable que des bovins et des ovins originaires d’UE soient envoyés dans une zone de guerre où ils sont exposés à un risque important de blessure ou de mort lors d’attaques de roquettes.

De plus ces exportations pourraient être contraires au droit européen. En effet l’article 13 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne exige que l’UE, lorsqu’elle formule et met en œuvre ses politiques agricoles et de transport, tienne « pleinement compte des exigences en matière de bien-être des animaux ». Autoriser la poursuite du transport d’animaux vers une région où des conflits armés graves sont en cours serait, selon nous, incompatible avec l’article 13.

En outre, l’article 3 du règlement (CE) n° 1/2005 du Conseil sur la protection des animaux pendant le transport dispose que « nul ne doit transporter ou faire transporter des animaux d’une manière susceptible de leur causer des blessures ou des souffrances inutiles ». De plus, dans l’affaire Zuchtvieh (C-424/13), la Cour de justice de l’UE a statué que les dispositions du règlement n° 1/2005 protégeant les animaux en cours de transport continuent de s’appliquer même lorsqu’une cargaison a quitté l’UE ; elles s’appliquent jusqu’à la destination finale dans le pays non membre de l’UE. Transporter des animaux dans cette région tant que les hostilités se poursuivent nous paraît donc contraire à l’article 3.

Pour ces raisons, les exportations d’animaux vivants vers Israël, mais aussi vers le Liban, doivent être suspendues dans les meilleurs délais.