En 2019, les régions flamandes et wallonnes de Belgique ont interdit l’abattage sans étourdissement. Toutefois, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pourrait remettre en cause cette interdiction, non seulement en Belgique, mais aussi pour tous les États membres qui ont choisi d’interdire l’abattage sans étourdissement. Les associations de protection animale qui se mobilisent depuis toujours pour la fin de l’abattage sans étourdissement mettent en garde contre l’arrêt de la CJUE, qui pourrait remettre en cause ces avancées.
Que dit la législation européenne sur l’abattage des animaux ?
Au sein de l’Union européenne, l’étourdissement des animaux avant leur abattage est rendu obligatoire par le règlement (CE) n°1099/2009 dans le but d’épargner à l’animal des souffrances évitables. Toutefois, le règlement prévoit la possibilité de dérogations à l’obligation d’étourdissement pour motifs religieux. Ainsi, certains États de l’U-E, tels que la Suède (1988), la Slovénie (2012), le Danemark (2014) et dernièrement, les provinces wallonnes et flamandes en Belgique ont décidé d’interdire l’abattage sans étourdissement, alors que d’autres comme la France ont choisi de conserver la possibilité de dérogations.
Il est scientifiquement reconnu que l’abattage sans étourdissement provoque de grandes souffrances, avec un retard de la perte de conscience pouvant atteindre quatorze minutes chez les bovins selon un rapport de l’Inra de 2009.
Une controverse belge aux répercussions potentiellement européennes
L’interdiction en 2019 de l’abattage sans étourdissement en Belgique pour les provinces wallonnes et flamandes ne s’est pas faite sans controverses. Plusieurs associations cultuelles ont déposé un recours devant la Cour constitutionnelle belge pour faire annuler cette décision, qui en a référé à la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE). Dans un avis du 10 septembre 2020, l’avocat général de la CJUE considère qu’au nom « de la liberté de religion et [du] droit de manifester sa religion ou ses convictions par le culte, l’enseignement, les pratiques et l’accomplissement des rites », les États membres de l’U-E ne peuvent refuser la possibilité de dérogation à l’étourdissement prévue par le règlement européen.
La décision de la CJUE est attendue avant la fin de l’année. La situation est aujourd’hui particulièrement critique, car l’avis de l’avocat général est malheureusement souvent suivi par les juges de la CJUE. Si tel était le cas, le Gouvernement belge serait contraint de revenir sur l’interdiction d’abattage sans étourdissement et les pays européens qui l’ont déjà interdit devraient en faire de même. Une telle décision limiterait grandement les possibilités de mettre un terme à l’abattage sans étourdissement et nuirait au développement de méthodes d’étourdissement alternatives au sein des États membres de l’UE.
Quelles alternatives ?
L’abattage sans étourdissement est pratiqué afin que l’animal soit saigné tout en étant maintenu en vie. Il existe pourtant une alternative : l’étourdissement électrique réversible. Cette méthode consiste à rendre l’animal inconscient et insensible pendant une courte période de temps, grâce au passage d’un courant électrique au niveau du cerveau. L’étourdissement électrique réversible est donc conciliable à la fois avec les prescriptions religieuses, puisque l’animal est encore en vie lors de la saignée et avec les exigences en termes de bientraitance animal. Ainsi, en Nouvelle-Zélande l’abattage sans étourdissement est interdit et la viande certifiée halal est produite grâce à cette méthode d’étourdissement. Au niveau européen, la Halal Food Authority (HFA), une association britannique de supervision et de certification des pratiques halal, a de plus déclaré soutenir cette méthode d’étourdissement réversible.
La demande d’alternative à l’abattage sans étourdissement reçoit aujourd’hui un fort soutien des citoyens. En effet, d’après un sondage réalisé pour Eurogroup for animals sur un échantillon de 23 126 européens en octobre 2020, 88% des citoyens français et la même proportion d’Européens estiment que les animaux devraient être étourdis avant d’être abattus, sans dérogation possible. De plus, 90% des européens et 88% des français considèrent que les Etats membres de l’Union Européenne devraient conserver le droit d’adopter au niveau national des mesures permettant d’améliorer les conditions d’abattage des animaux. Des alternatives étant disponibles et largement soutenues par les citoyens français et européens, Welfarm et Eurogroup for Animals – notre fédération européenne qui représente à Bruxelles les associations de protection animale – demandent que la CJUE ne revienne pas sur la possibilité pour les États membres d’interdire l’abattage sans étourdissement. Welfarm et Eurogroup for animals souhaitent, au contraire, que des alternatives comme l’étourdissement réversible soit généralisées dans l’ensemble des pays européens.