Castration des porcelets : Welfarm interpelle le PDG de Bigard

élevage porcelets
©didesign

Dans le cadre de sa campagne #StopCastration menée depuis 2016, Welfarm a sollicité à de nombreuses reprises le groupe Bigard afin d’ouvrir le dialogue sur la castration des porcelets. Toutes les demandes de l’association étant restées sans réponse, elle avait adressé une lettre ouverte  au PDG du groupe, Jean-Paul Bigard, en mars 2022. Welfarm demandait à l’entreprise de laisser à ses partenaires commerciaux de la filière porcine le choix des alternatives à la castration physique qu’ils souhaitent mettre en œuvre, et de revoir son positionnement sur ces alternatives.

En effet, de nombreux acteurs de l’amont et de l’aval – éleveurs, transformateurs et distributeurs – sont favorables à l’élevage de mâles entiers, mais se heurtent à la politique de Bigard en la matière. Le groupe, qui représente environ 25 % du marché de l’abattage de porcs en France, applique une importante pénalité de -23 centimes par kilo de carcasse lorsque les porcs qui arrivent dans ses abattoirs sont entiers : de quoi inciter les éleveurs à continuer de castrer physiquement les porcs et dévaloriser les alternatives.

À l’occasion du Space, rendez-vous international du monde de l’élevage, qui se tient à Rennes du 12 au 14 septembre 2023, Welfarm a décidé d’adresser une nouvelle lettre ouverte à Jean-Paul Bigard et souhaite rencontrer les services RSE/qualité du groupe breton.


Monsieur Jean-Paul Bigard
Président-Directeur Général
Groupe Bigard
Kergostiou
29300 QUIMPERLE

Metz, le 12 septembre 2023

Objet : Lettre ouverte sur les alternatives à la castration physique des porcelets

Monsieur Jean-Paul Bigard,

Notre association Welfarm – Protection mondiale des animaux de ferme, dont la mission est reconnue d’utilité publique, mène campagne contre la castration physique des porcelets depuis 2016. Dans le cadre de notre campagne, nous avions sollicité à plusieurs reprises une rencontre avec vos services par courrier et par voie électronique, mais toutes nos demandes sont restées sans réponse.

En mars 2022, nous vous avions adressé une lettre ouverte pour vous demander, d’une part, de laisser à vos partenaires de l’amont et de l’aval de la filière porcine, le choix des alternatives à la castration physique qu’ils souhaitent mettre en œuvre et, d’autre part, de revoir votre positionnement sur les alternatives à la castration physique des porcelets. Votre forte implantation, en tant que leader du marché français de l’abattage et de la découpe de viande issue de porcs, ne devrait pas menacer les engagements d’ores et déjà pris par certains professionnels de l’amont et de l’aval de la filière. Elle est au contraire source de responsabilités : celle d’entendre les éleveurs, les transformateurs et les distributeurs qui souhaitent s’engager vers les alternatives à la castration physique des porcelets, ainsi que les consommateurs, dont 85 % sont défavorables aux mutilations pratiquées sur les porcs[1].

Nos demandes étant restées lettre morte, nous n’avons pas eu d’autre choix que de venir vous interpeller, en octobre dernier, devant votre siège social. Nous vous avions alors remis le trophée du Plus Grand Castrateur de Porcelets de France pour vos prises de position en faveur du maintien de la castration chirurgicale, qui empêchent de nombreux acteurs de la filière porcine de s’engager sur la voie des pratiques alternatives à la castration physique, ainsi que pour votre politique tarifaire, qui pénalise très fortement le mâle entier et incite donc les éleveurs à continuer de castrer physiquement leurs porcs.

Le constat est accablant. Depuis la publication de notre première lettre ouverte, il y a plus d’un an, la politique du groupe Bigard concernant la castration physique des porcelets n’a pas bougé d’un iota. En raison de votre refus d’engager le dialogue, nous ne pouvons voir dans votre rejet des alternatives à la castration physique qu’une position dogmatique, qui va à l’encontre des avancées nécessaires et attendues par les citoyens, vos fournisseurs et vos clients, en matière de bien-être animal.

Les arguments en faveur du maintien de la castration physique, avancés dans les prises de position publique de Culture Viande, sont éculés. S’il faut encore le rappeler, il est scientifiquement prouvé que la castration physique est source de très fortes douleurs pour les porcelets[2], et que les protocoles d’anesthésie et d’analgésie ne soulagent que partiellement cette dernière[3]. Le dernier avis scientifique de l’EFSA3 (Autorité européenne de sécurité des aliments) sur le bien-être des porcs, indique que l’immunocastration et l’élevage de porcs mâles entiers sont préférables à la castration chirurgicale. Ainsi, il est irréfutable que l’absence de castration physique est la seule solution satisfaisante en matière de bien-être animal.

Pour toutes ces raisons, Welfarm vous conjure :

  • de mener des essais d’approvisionnement auprès d’élevages de porcs mâles entiers ou vaccinés, afin de vérifier par l’expérience la viabilité de ces pratiques et la qualité des viandes obtenues ;
  • de revoir votre position et de changer votre politique, en cessant de dénigrer publiquement les alternatives à la castration physique et de pénaliser le mâle entier au moment de l’achat ;
  • d’accepter le dialogue avec les représentants de la société civile. Nous considérons que la culture de l’opacité ne peut jamais être une réponse aux demandes légitimes des citoyens concernant la souffrance animale. Au contraire, notre association ne demande qu’à vous appuyer dans cette transition vers des alternatives plus respectueuses de l’intégrité physique des porcs.

Pour pouvoir échanger de manière approfondie sur nos demandes, nous vous proposons de convenir d’une réunion avec vos services RSE et qualité dans les semaines à venir.

Nous vous prions de croire, Monsieur, en l’assurance de notre profond respect.

Ghislain Zuccolo
Directeur Général

[1] Sondage Yougov, 2017

[2] Le Neindre, P., Guatteo, R., Guemene, D., Guichet, J. L., Latouche, K., Leterrier, C., … & Serviere, J. (2009). Douleurs animales. Les identifier, les comprendre, les limiter chez les animaux d’élevage (Doctoral dissertation, auto-saisine).

[3] EFSA AHAW Panel (EFSA Panel on Animal Health and Welfare), Nielsen SS, Alvarez J, Bicout DJ, Calistri P, Canali E, Drewe JA, Garin-Bastuji B, Gonzales Rojas JL, Gort´azar Schmidt C, Herskin M, Michel V, Miranda Chueca MA, Padalino B, Roberts HC, Stahl K, Velarde A, Viltrop A, Winckler C, Edwards S, Ivanova S, Leeb C, Wechsler B, Fabris C, Lima E, Mosbach-Schulz O, Van der Stede Y, Vitali M and Spoolder H, 2022. Scientific Opinion on the welfare of pigs on farm. EFSA Journal 2022;20(8):7421, 315 pp. https://doi.org/10.2903/j.efsa.2022.7421


Vous pouvez vous aussi agir pour tenter d’infléchir la position du groupe Bigard sur la castration des porcelets. On vous explique comment ici.