Ce Noël, les Vol’Aïe ont mal

La neige tombe et recouvre le paysage d’un manteau blanc, des décorations resplendissantes illuminent les rues, l’odeur réconfortante du chocolat chaud emplit les narines… Dehors, c’est déjà Noël ! La saison des fêtes de fin d’année approche et avec elle son lot de cadeaux et de plaisirs partagés autour d’un bon repas.

Une ombre vient toutefois ternir ce tableau idyllique. À Noël, ce n’est en effet pas la fête pour tout le monde… Chaque année les volailles, ou les produits qui en sont issus, sont les stars de la table. Foie gras, chapons, dindes de Noël… La liste de nos achats est longue. Peu savent pourtant dans quelles conditions sont élevées ces animaux. 

Derrière la magie des fêtes se cachent les pires pratiques d’élevage, contraires aux fondamentaux du bien-être animal. Canards et oies gavés pour la production de foie gras, poulets castrés à vif pour être transformés en chapons et dindes élevés de façon intensive : nous vous révélons les secrets de ces productions et nous vous proposons des moyens d’action pour ne plus cautionner ces pratiques. 

Le gavage des canards et des oies

La France est le plus gros producteur de foie gras au monde : 70% de la production mondiale de foie gras est 100% française1, ce qui représente un total de 27 millions de canards gavés dans l’hexagone en 2020 (30 millions en 20192) et quelques centaines de milliers d’oies.

Pour produire du foie gras, les canards et les oies doivent être gavés. Le gavage est un acte d’une extrême violence : un tube long de 20 à 30 cm est enfoncé dans l’œsophage des oiseaux pour déverser directement la nourriture dans leur jabot en seulement quelques secondes. En fin de gavage, les canards reçoivent 2 rations de 450g soit 900g ingéré de force par jour ! La quantité d’aliments ingurgitée en une fois est si importante que les animaux halètent, régurgitent et suffoquent. Certains souffrent même de lésions voire de perforations de l’œsophage 

Le gavage consiste littéralement à rendre le foie du canard ou de l’oie malade. Il est à l’origine de nombreux problèmes de santé notamment des diarrhées. Hypertrophié, le foie des canards peut à la fin de la période de gavage représenter à lui seul 10% du poids de l’animal, ce qui entraîne de graves difficultés pour respirer et se déplacer. Pour toutes ces raisons, le taux de mortalité des canards en période de gavage est multiplié de 10 à 20.

L’ingestion forcée d’aliments est contraire à tous les fondamentaux du bien-être animal. Le gavage est pour cette raison interdit par plus de 12 pays européens. Or, de son côté, le Code rural français ne contient aucune disposition à même de soutenir des méthodes alternatives au gavage. Il prévoit en effet qu’ « on entend par foie gras, le foie d’un canard ou d’une oie spécialement engraissé par gavage »3

Le chaponnage des poulets

Avec 3 millions de chapons commercialisés chaque année, le chapon est une des volailles incontournables du repas de Noël (chiffre de 20204). Or, pour être transformés en chapons, les poulets, et plus rarement les pintades mâles, doivent être castrés avant d’avoir atteint la maturité sexuelle (on parle de « chaponnage »). Cette castration est réalisée à vif, sans anesthésie ni analgésie, même dans les élevages sous signes de qualité (Label Rouge, biologique, AOP/AOC…). 

Lors du chaponnage, une ou deux incisions sont pratiquées à vif dans la chair de la volaille. La plaie est ensuite maintenue ouverte à l’aide d’un écarteur pour arracher les testicules situés à l’intérieur de l’abdomen. À l’issue de l’opération, la plaie est parfois laissée ouverte. Cette pratique est source de souffrances extrêmes pour le poulet et la pintade. Sa cruauté est d’autant plus injustifiable que la castration est uniquement réalisée pour des raisons gustatives afin d’obtenir une plus grande tendreté de la viande !

En plus du chaponnage, les conditions d’élevage des chapons posent de nombreux problèmes. Même sous signes de qualité, les chapons n’ont pas accès à l’extérieur les dernières semaines de leurs vies, contrairement au reste de leurs congénères. La plupart sont enfermés dans des bâtiments obscurcis pour faciliter leur engraissement. 

Pour les AOP Volailles de Bresse, les conditions d’élevage sont encore plus terribles. Les poulets chaponnés sont enfermés dans des cages d’engraissement pendant au moins 4 semaines. Ils sont confinés pendant cette période à des densités de 9 chapons/m², sachant que ces oiseaux pèsent 5 à 6 kg à l’abattage ! 

L’élevage intensif des dindes

97% des dindes sont en levées de façon intensive, enfermées en permanence dans des bâtiment très faiblement éclairés, sans accès à l’extérieur. À quelques exceptions près, aucun aménagement, tels que perchoirs, matériaux à picorer et plates-formes surélevées, n’est prévu dans ces élevages. De plus, faute de réglementation spécifique pour encadrer l’élevage de dindes, il n’existe aucune limitation du nombre d’animaux par bâtiment. On estime ainsi la densité moyenne en élevage standard à 8 dindes/m² !

Ces conditions d’élevage sont néfastes au bien-être des dindes. Elles consacrent habituellement 50% de leurs activités à explorer leur environnement et à picorer mais l’absence d’aménagements et la faible luminosité des bâtiments les empêchent de satisfaire ces besoins comportementaux. Alors que les dindes vivent normalement en petits groupes, les densités très élevées en élevages induisent un stress important et des comportements agressifs entre congénères. Pour limiter ces agressions, les dindes sont épointées (opération consistant à supprimer l’extrémité du bec) et en général dégriffées.

Par ailleurs, les litières des élevages ne sont pas changées assez fréquemment et se retrouvent saturées d’excréments. Cette dégradation rapide est à l’origine de troubles respiratoires et de lésions cutanées très douloureuses pour les dindes. 

Enfin, les dindes de ces élevages intensifs ont été sélectionnées pour atteindre rapidement une très forte corpulence. En 4 mois, les dindes atteignent les 11 kg alors que leur cousin sauvage n’en pèse que 3,55 ! Cette hyper sélection est dangereuse pour leur santé : du fait de leur poids et de leurs muscles hypertrophiés, les dindes en fin d’engraissement se déplacent difficilement et nombre d’entre elles présentent des boiteries, voire des fractures. En outre, à cause de cette sélection les dindes ne peuvent pas se reproduire naturellement. La reproduction est donc souvent assurée par des employés d’élevage. Or, récolter le sperme des mâles et inséminer artificiellement les femelles nécessitent de nombreuses manipulations des animaux qui sont stressantes et peuvent occasionner des lésions.

Comment agir ?

La production de foie gras et de chapons repose sur des pratiques extrêmement cruelles. Or, que ce soit pour le foie gras ou les chapons, ces souffrances sont infligées aux animaux uniquement pour des raisons gustatives. Sous couvert de tradition, la recherche de méthodes alternatives est très peu développée, pour ne pas dire inexistante.

Quel que soit le label éventuellement en cause, nous recommandons donc de passer des fêtes sans consommer ni de foie gras ni de chapons. Veillez également à ne pas consommer les autres produits issus du gavage des canards et des oies comme le magret ou le confit. Pour votre consommation de canards, mieux vaut donc privilégier la viande de canard « à rôtir » en bio ou sous signe d’identification de la qualité et de l’origine (« SIQO ») , car ils sont élevés en plein air pour leur chair et non pour la production de foie gras.

Lorsque des « dindes de Noël » sont vendues sous signes de qualité et avec cette appellation, celles-ci ont eu accès à un parcours extérieur et ont été élevées dans des conditions plus respectueuses de leur bien-être. Toutefois, toutes les dindes servies à Noël ne sont pas labellisées ! La plupart provient d’élevages intensifs : elles peuvent être servies en découpe ou entières. Dans ce dernier cas, elles ont simplement été abattues plus tôt que d’habitude (on parle alors de « baby dindes »). 

Nous vous conseillons donc de privilégier l’achat de produits portant les mentions suivantes : dindes fermières avec les mentions élevées en liberté ou élevées en plein air, label Rouge ou Agriculture Biologique.

Enfin, la meilleure façon de mettre un terme aux pires souffrances des animaux et de faire connaître ces pratiques : diffusez nos messages autour de vous et PARTAGEZ notre article !

Demain (11 décembre), à Metz, nous tiendrons un stand Colonne de Merten, rue Serpenoise à partir de 11h. N’hésitez pas à nous rejoindre !

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1 https://www.itavi.asso.fr/download/10930
2 Chiffres Agreste.
3 Article L654-27-1 du Code rural et de la Pêche Maritime
4 Source Agreste. 
5 Enquete avicole 2015 – Synthese des Résultats Technico Economiques, http://www.bretagne.synagri. com/ca1/PJ.nsf/TECHPJPARCLEF/27123/$File/Enquete-avicole2015-ResultatsTechnicoEconomique