Dans l’enfer des transports d’agneaux

Non sevrés, les animaux sont chargés en grand nombre dans des camions souvent inadaptés, parcourant des milliers de kilomètres à travers l’Europe sans être nourris, ni déchargés… 

Les fêtes se suivent et se ressemblent tristement pour les animaux : pour la quatrième année consécutive, l’ONG AWF a enquêté sur le sort des agneaux, dont une grande partie est commercialisée au moment de Pâques. Le constat est une nouvelle fois dramatique pour ce mets considéré comme festif par bon nombre de Français… 

Un an d’enquête accablant 

Sur la vidéo d’investigation, on peut voir des centaines de jeunes animaux transportés sur des milliers de kilomètres, entassés dans des camions parfois insalubres ou inadaptés, aussi bien en ce qui concerne l’habitacle que le dispositif d’abreuvement et de nourrissage. Les animaux sevrés et non sevrés semblent mélangés, alors que les normes réglementaires qui les protègent ne sont pas les mêmes. Certains agneaux ne parviennent pas à boire ou à s’alimenter correctement, chutent ou se coincent les pattes dans les séparations entre les étages du camion… Blessés, assoiffés, ils mourront avant même d’arriver à destination. Dans tous les camions d’agneaux à destination de l’Italie inspectés par AWF, des infractions ont été constatées. 

La situation est encore plus préoccupante cette année en raison de l’épidémie de Covid-19. En effet, le transport d’animaux s’avère actuellement soumis à des contrôles extrêmement réduits. Depuis plusieurs jours, la Commission européenne a pris des mesures visant à faciliter la circulation des biens et des animaux et a ainsi assoupli de manière drastique les procédures de contrôles : simplification des formalités, mise en place de voies rapides pour les transports d’animaux, réduction des contrôles vétérinaires et administratifs… Autant de mesures qui ouvrent malheureusement la voie à de nombreuses dérives en cette période de crise. À cet assouplissement des mesures de contrôle vient s’ajouter la sur-mobilisation des forces de l’ordre pendant cette période, qui font passer les contrôles de transport d’animaux au second plan. Il est également impossible pour les ONG lanceurs d’alerte de dénoncer les manquements à la réglementation en période de confinement.  Face à cette situation, et au manque de chauffeurs disponibles, la tentation est grande de surcharger les camions pour compenser les pertes au détriment des animaux… 

La France responsable

Chaque année, 3 millions d’agneaux sont transportés dans toute l’Europe, principalement depuis la Hongrie et la Roumanie. La France prend part à ce commerce, puisqu’elle est la troisième productrice européenne de viande ovine et exporte chaque année près de 375 000 agneaux, dont 50 000 en Italie. Dans le même temps, elle en importe 241 000, notamment au moment des fêtes de Pâques. 

Avant de subir ces longs transports, la grande majorité des agneaux français destinés à la production de viande sont élevés en bergerie, sans aucun accès à l’extérieur. Dans ce système fourrager, les agneaux sont séparés de leur mère très jeunes (à environ 80 jours). Ces dernières sont souvent mutilées à vif : leur queue est coupée sans anesthésie afin de faciliter l’insémination artificielle et l’agnelage, et tenter de limiter la survenue d’infections au niveau de la queue. 

Les ONG mobilisées

Le 19 mars dernier, Welfarm  et 37 associations ont adressé un courrier à la Commission et au Conseil de l’Union européenne, demandant notamment de limiter le transport des animaux d’élevage à huit heures. Nous mettions déjà en exergue que les contrôles pendant la crise Covid-19 seraient trop faibles pour permettre le respect du règlement sur le transport des animaux. À la suite de la publication de cette nouvelle enquête, Welfarm réitère sa demande de suspendre les longs transports d’animaux et d’interdire le transport d’animaux non sevrés, tels que les agneaux de moins de 6 semaines.  

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