Interdiction d’importation dans l’UE de produits issus de la déforestation : en quoi cela concerne le bien-être des animaux d’élevage

Une proposition de règlement de la Commission européenne visant à bannir l’importation en Europe de produits issus de la déforestation est actuellement en discussion au Parlement européen. Si elle entrait en vigueur, une telle interdiction serait avant tout une avancée écologique… mais aussi pour le bien-être des animaux d’élevage.

Les bovins (dont les veaux de boucherie) sont la plupart du temps nourris à base d’aliments concentrés, dont des tourteaux de soja.

En novembre 2021, une proposition de règlement a été adoptée par la Commission européenne dans le but d’empêcher la commercialisation de certains produits qui contribuent à la déforestation, en particulier le soja. La fédération européenne d’associations de défense des animaux Eurogroup for Animals, dont Welfarm est membre, rejoint la coalition #Together4Forests en faveur de ce texte actuellement en discussion au Parlement européen.

Un soja importé principalement issu de la déforestation

Dans l’Union européenne, 90% du soja consommé par les animaux d’élevage est importé, soit plus de 30 millions de tonnes. Pour la France, cela représente environ 3,2 millions de tonnes de tourteaux de soja1 importés en 2020.

Au niveau mondial, les trois principaux producteurs de soja sont les États-Unis, l’Argentine et le Brésil. Le Brésil reste de loin le plus gros fournisseur de la France2, représentant plus de 60% des importations françaises en tourteaux de soja3, suivi par l’Argentine (10%). Cette forte dépendance de la France aux importations de soja est problématique sur le plan environnemental.  En effet, en Amérique du Sud, la culture de soja se traduit généralement par une monoculture à base de variétés OGM pratiquée sur des immenses surfaces résultant principalement de la déforestation. Chaque année au Brésil, environ 10.000 km2 de forêt disparaissent, soit l’équivalent de la superficie du Liban.

Bovins et volailles sont les principaux consommateurs de soja importé

En France, 90% du soja importé est consommé à parts quasi égales par les bovins et les volailles. Les volailles de chair et de ponte sont les premières consommatrices des tourteaux de soja (44% du total) suivies par les bovins laitiers et mixtes (36%), les bovins à viande (8%) et les porcs (6%)4.

Moins d’importation de soja pour moins d’élevage intensif

Empêcher l’importation de soja ouvre une nouvelle voie pour une réduction de l’élevage intensif en Europe au sein de l’UE.

Les bovins (dont les veaux de boucherie) sont la plupart du temps nourris à base d’aliments concentrés, dont des tourteaux de soja. C’est un moyen de gonfler les apports protéiques de leurs rations, d’augmenter leur productivité et de réduire le besoin de leur donner accès aux prairies. De surcroît, un apport trop important de ce type de concentrés est à même de troubler le fonctionnement du rumen (premier estomac) des ruminants, ce qui provoque des troubles métaboliques.

Interdire l’importation de soja issu de la déforestation permettrait de faire baisser la part d’aliments concentrés dans l’alimentation des bovins. Il s’agit tout simplement de les laisser brouter de l’herbe pâturée ou de consommer davantage de fourrages, une alimentation plus conforme à leurs besoins naturels. C’est pourquoi Welfarm exige un plus grand accès des bovins à un extérieur aménagé, sur une plus longue période dans l’année.

Un texte applicable à l’importation d’animaux au sein de l’UE

Le texte en discussion au Parlement prévoit aussi l’interdiction de la mise sur le marché au sein de l’UE de viande bovine issus d’élevages intensifs où les animaux sont nourris au soja, notamment au Brésil, et qui contribuent donc à la déforestation. Indirectement, interdire l’importation de produits issus de ces élevages réduirait la claustration en bâtiment de ces bovins.

Mais cette interdiction à la seule viande bovine ne saurait suffire. Eurogroup for Animals et Welfarm militent pour l’extension de cette interdiction aux volailles et aux porcs. Cela permettrait par exemple de limiter les importations de poulets ukrainiens au sein de l’UE. Dans les élevages ukrainiens, les poulets sont quasiment tous élevés de manière intensive, en claustration, et nourris à l’aide de soja importé dont la culture contribue à la déforestation.

1 Les tourteaux de soja sont une sorte d’agglomérat de graines de soja pressées dont l’huile a été extraite préalablement.

2 https://chaire-bea.vetagro-sup.fr/en-france-les-animaux-delevage-sont-nourris-avec-du-soja-issu-de-la-deforestation-vrai-ou-faux/

3 La France Agricole, Marie-Astrid Batut et Eric Young, Comment se passer du soja brésilien, mars 2022

4 Voir référence 2