Depuis son émergence en Savoie fin juin 2025, la dermatose nodulaire contagieuse bovine s’est diffusée dans onze départements dans l’est et dans le sud-ouest de la France, malgré les mesures de lutte mises en place par le Gouvernement qui ont coûté la vie à environ 3 000 bovins et suscité la colère des éleveurs.

Des centaines d’animaux abattus, pour la plupart en bonne santé ; des éleveurs en colère en raison de mesures de lutte jugées inadaptées et injustes ; des gaz lacrymogènes et des véhicules blindés utilisés pour déloger des paysans qui tentent d’empêcher l’abattage de leurs troupeaux… C’est, au 15 décembre 2025, le bilan de la stratégie choisie par le Gouvernement pour lutter contre l’épizootie de dermatose nodulaire contagieuse bovine (DNC).
Détectée pour la première fois fin juin 2025 en Savoie, la DNC est, à l’heure où nous écrivons ces lignes, présente dans onze départements : Savoie, Haute-Savoie, Ain, Rhône, Jura, Pyrénées-Orientales, Doubs, Ariège, Hautes-Pyrénées, Haute-Garonne et, depuis le 15 décembre, dans l’Aude.
La dermatose bovine présente en Europe depuis 2015
La dermatose bovine est une maladie infectieuse virale qui affecte principalement les bovins domestiques. Transmise notamment par les piqûres d’insectes hématophages (mouches, taons, tiques…), la DNC est apparue en Afrique il y a plus d’un siècle. Elle s’est étendue au Moyen-Orient à partir des années 2000, puis vers le sud-est de l’Europe, avec des cas détectés en Grèce et dans les Balkans à partir de 2015.
Outre l’apparition de nodules sur la peau des animaux infectés, cette maladie peut s’accompagner d’autres symptômes, tels que de la fièvre, un amaigrissement, des avortements, des lésions buccales, et peut dans certains cas conduire à la mort des animaux ; le taux de mortalité serait de l’ordre de 1 à 5 % en moyenne. La DNC n’est pas une zoonose, c’est-à-dire que cette maladie n’est pas transmissible à l’homme.
Une stratégie sanitaire basée sur des abattages massifs
Face à cette crise sanitaire, les pouvoirs publics ont mis en place des mesures de lutte, à savoir :
– détection précoce des foyers ;
– instauration de zones réglementées autour des foyers ;
– dépeuplement total des bovins des foyers (par l’euphémisme « dépeuplement », l’État entend l’abattage de l’intégralité d’un troupeau dès lors qu’un cas de DNC est détecté à l’intérieur de celui-ci) ;
– dans les zones réglementées, vaccination massive obligatoire, et interdiction de mouvements de bovins (sauf en cas de dérogation) ;
111 foyers de dermatose bovine détectés en France
On peut légitimement s’interroger sur l’efficacité des mesures mises en place, puisque, depuis l’émergence de la DNC en juin 2025, la maladie n’a cessé de progresser sur le territoire national, passant des Alpes au Jura, puis au sud-ouest de la France. En date du 13 décembre, 111 foyers avaient été détectés en France, selon les chiffres du ministère de l’Agriculture.
Pourquoi attendre qu’un troupeau soit infecté et abattu pour vacciner les bovins dans la zone, alors qu’on constate que la maladie continue de progresser par ailleurs ?
Depuis l’émergence de la dermatose bovine, environ 3 000 bovins ont été abattus en France, selon France 24. Une vaccination contre la DNC pourrait pourtant prévenir la contraction de la maladie et sa propagation dans les troupeaux, et ainsi épargner la vie de centaines d’animaux.
Renforcement tardif du dispositif de lutte
Les pouvoirs publics ont fait un premier pas dans cette direction le 12 décembre. Face à la dégradation rapide de la situation dans le Sud-Ouest, le ministère de l’Agriculture a décidé « d’étendre le dispositif de lutte » en instaurant une zone vaccinale étendue. Elle couvre les départements de l’Aude, de la Haute-Garonne, du Gers, des Pyrénées-Atlantiques (à l’exception des communes déjà situées en zone réglementée) et des Landes.

Deux jours plus tard, la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, a déclaré au micro d’Europe 1 qu’elle considère la vaccination comme « un chemin d’espoir pour empêcher l’abattage des troupeaux ». Mais alors, pourquoi ne pas transformer ce chemin en boulevard, en vaccinant sans délai l’ensemble du cheptel français ?
Exportations VS vaccination
On peut supposer qu’une fois de plus, les intérêts économiques priment sur la vie de milliers d’animaux dans l’esprit des décideurs.
En effet, si les mouvements de bovins vaccinés depuis la zone vaccinale vers une zone indemne de France sont possibles sous conditions, c’est plus compliqué lorsqu’il s’agit d’exporter. Sans accord du pays de destination (et de transit le cas échéant), les exportations d’animaux vivants sont impossibles.
Une vaccination généralisée sur tout le territoire national aurait donc pour effet de stopper temporairement les exportations françaises de bovins.
Arrêtons le massacre !
Pour Welfarm, il est inadmissible, alors qu’on dispose d’un vaccin contre la DNC, que le Gouvernement préfère exposer les animaux à un risque de contamination dans un objectif purement économique : continuer à exporter des animaux vivants.
Notre organisation juge inacceptable que, lorsqu’un cas de dermatose bovine apparaît dans un troupeau, l’ensemble des animaux soient abattus, donc même ceux qui sont sains. Welfarm considère que les euthanasies doivent concerner uniquement les animaux contaminés.
Cette mesure de précaution devrait alors être associée à un protocole strict pour la gestion des autres animaux du troupeau compte tenu de la période d’incubation de la maladie : isolement/quarantaine du troupeau concerné, restrictions de mouvements et mesures de biosécurité renforcées dans l’objectif d’empêcher la propagation du virus.
Welfarm appelle à une vaccination généralisée de l’ensemble du cheptel bovin français et à l’arrêt des abattages systématiques de troupeaux.
(1) https://agriculture.gouv.fr/dermatose-nodulaire-contagieuse-des-bovins-dnc-point-de-situation
