La castration des porcelets va-t-elle réellement être interdite en France ?

Une annonce évoquée depuis des années qui n’a, pour le moment, jamais été suivie d’effets. Au-delà de cette louable déclaration d’intention, il est urgent d’interdire officiellement cette pratique, qui cause inutilement la souffrance de 10 millions de porcelets mâles chaque année dans notre pays.

Castration des porcelets : Stéphane Travert en parlait déjà !

En juillet 2018, le précédent ministre de l’Agriculture, Stéphane Travert, annonçait qu’une feuille de route de sortie de la castration sans anesthésie serait publiée avant la fin de l’année 2018. Il était temps : l’Allemagne, premier exportateur de porcs en Europe, venait de voter l’interdiction de cette mutilation à vif embrayant ainsi le pas à la Suisse, la Norvège, la Suède ou le Danemark. Mais ce plan n’a jamais été publié… Un an et 10 millions de porcelets mâles castrés sans anesthésie plus tard, l’espoir renaît lorsqu’en en juillet 2019, le nouveau ministre de l’Agriculture Didier Guillaume commence à parler de « grandes annonces sur le bien-être animal ». Avant de les repousser à fin août. Avant de les repousser à octobre. Et avant de dire qu’elles ne seront probablement annoncées qu’au mois de décembre prochain. En retardant sans cesse les échéances, le Gouvernement oublie que, pendant ce temps, des milliers d’êtres sensibles souffrent quotidiennement en élevage. Pour rien. Pour rien, car s’il fut une époque où l’on castrait les cochons mâles pour éviter un risque d’odeur dans la viande, aujourd’hui ce « problème d’odeur » est connu, entièrement maîtrisé et maîtrisable. En effet, seuls 3 % des cochons mâles sont susceptibles de donner une viande odorante à la cuisson. Une solution consiste à détecter ces 3 % de carcasses odorantes à l’abattoir et à les orienter vers des produits non cuits par le consommateur, et donc, non concernés par ce risque d’odeur. Aujourd’hui, plus de 2 300 éleveurs français de l’entreprise Cooperl ont arrêté de castrer leurs animaux, car le groupement a mis en place ce système de détection de carcasses à l’abattoir. Une solution qui a fait ses preuves et qui évite la castration des animaux. Elle peine cependant à se généraliser en France, notamment car l’entreprise Bigard, qui abat 90 000 porcs par semaine, refuse catégoriquement de développer cette technique, obligeant ainsi des milliers d’éleveurs à castrer leurs cochons. Face au numéro 1 de la viande en France, la voix des animaux pèse bien peu et semble expliquer la frilosité de nos dirigeants à interdire cette mutilation.

« Mettre un terme » ou « interdire » la castration à vif ? 

La nuance peut paraître subtile, mais elle est lourde de conséquences. Si l’interdiction de la castration sans anesthésie serait un immense soulagement pour des millions de porcelets et des milliers d’éleveurs réticents à castrer leurs animaux, les échanges du ministre avec les associations de protection animale, ainsi que le lexique utilisé dans les déclarations publiques qui ont suivies, semblent nettement moins engageants. Car « mettre un terme à la castration des porcelets » à travers un énième rapport parlementaire ou un plan de progrès élaboré conjointement avec la filière ne changera en rien la situation des cochons : seule une interdiction officielle de cette mutilation à vif entraînera un changement de pratique durable et réellement bénéfique pour les animaux. En jouant sur les mots, le Gouvernement entretient la confusion : dans la presse, la fin de la castration des porcelets est annoncée en grande pompe, mais il convient de rester extrêmement prudent. Car, en matière de protection animale, nous ne sommes malheureusement pas à une désillusion près : la fin de l’élevage en cage pour les poules pondeuses ou l’obligation de mettre en place des caméras de vidéosurveillance en abattoir sont autant de mesures qui ont fait l’objet d’une large couverture médiatique à une certaine époque, mais qui n’ont jamais été votées. Il ne faudrait pas que ce phénomène se reproduise une fois de plus sur la question de la castration des porcelets. Rappelons que cet acte est réalisé à la chaîne, au scalpel, auprès de 85 % des porcelets mâles en France. Une vidéo tournée en août 2019 dans un élevage fournissant l’IGP Jambon de Bayonne a montré que cette pratique cruelle concerne tous les systèmes de production, y compris ceux destinés à produire de la « viande de qualité ». La castration des cochons est un non-sens sur tous les plans, aussi bien éthique, qu’économique ou environnemental. Au-delà des effets d’annonces, le Gouvernement doit agir : aujourd’hui, 80 % des Français interrogés sur la castration à vif des porcelets se prononcent en faveur de son interdiction. Plus de 180 000 citoyens ont signé la pétition réclamant l’interdiction de cette mutilation. Tant que cette mesure ne sera pas officielle c’est à nous, citoyen.nes, de rester attentifs. Continuons à nous mobiliser sur stopcastration.fr pour interdire formellement la castration à vif des porcelets.

Laisser un commentaire