Les dérives de l’élevage intensif : l’enfouissement des cadavres, une fausse solution dangereuse pour l’environnement

Les vagues de chaleur de plus en plus fréquentes entraînent des surmortalités dans les élevages. En cas d’engorgement des services d’équarrissage1, le préfet donne son feu vert à l’enfouissement des cadavres. Cette méthode n’est aucunement satisfaisante tant du point de vue du bien-être animal que de l’environnement.

Des centaines de milliers d’oiseaux morts ont été enfouis en Vendée lors de l’épidémie de grippe aviaire du printemps dernier.

L’enfouissement, un pansement sur une jambe de bois

L’enfouissement des cadavres d’animaux n’est évidemment pas une solution adaptée aux épisodes de fortes chaleurs, ni aux épidémies. Il ne traite pas le problème de la surmortalité de manière structurelle afin de l’éviter mais uniquement de manière superficielle en la camouflant.

En 2019, les vagues de chaleur ont entraîné une surmortalité de 40% dans les élevages de porcs et volailles2. Lors de l’épidémie de grippe aviaire du printemps dernier, quelque 16 millions de volailles ont été abattues en France, un record. Dans les deux cas, des centaines de milliers d’animaux ont été enfouis.

Réduire les densités dans les élevages, permettre aux animaux d’évoluer dans un environnement adapté à leurs besoins : telles sont les transformations à mettre en branle afin de faire face au réchauffement climatique et aux souffrances qu’il engendre pour les animaux. C’est d’ailleurs l’objet de la grande campagne « Chaud Dedans ! » de Welfarm.

De surcroît, l’enfouissement est une véritable menace pour l’environnement.

L’enfouissement, un danger pour l’environnement et les hommes

Selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) : « La décomposition d’un cadavre (…) a (…) un impact sur l’environnement et sur la biodiversité des écosystèmes terrestres puisque les cadavres sont des habitats spécifiques et/ou des ressources pour de nombreuses espèces de microorganismes, d’insectes (mouches, coléoptères) et d’espèces végétales pionnières. »3

Voici une liste non exhaustive des dangers de l’enfouissement :

ꟷPollution des sols, des eaux de surface et des eaux souterraines.

Des molécules thérapeutiques (antibiotiques, antiparasitaires ou antifongiques) sont présentes dans les cadavres. Lors de leur décomposition, ces molécules se diffusent dans le sol et peuvent contaminer des nappes phréatiques. Au vu des connaissances actuelles, les antibiotiques constituent la plus grande menace : ils favorisent la diffusion de germes résistants et libèrent des gènes de résistance pouvant être transférés aux bactéries environnementales.

La diffusion de ces molécules thérapeutiques a également des conséquences sur les végétaux et la décomposition des cadavres change le pH des sols et leur concentration en nutriments et augmente la quantité de nitrate.

À noter que dans le cas des élevages de poissons en eau douce, en cas de surmortalité, les poissons commencent à se décomposer dans les bassins. Les cours d’eau sont alors pollués si les animaux ne sont pas éliminés rapidement.

ꟷDiffusion d’agents pathogènes aux animaux et aux humains

L’ANSES appelle à la prudence et à la mise en place de mesures de biosécurité lors de l’enfouissement de cadavres d’animaux. Ces mesures sont indispensables pour « éviter toute dissémination d’agents pathogènes aux élevages et autres animaux et/ou êtres humains à proximité ».

ꟷUn enfouissement qui laisse peu de traces visibles

Toujours selon l’ANSES, « le suivi dans le temps (traçabilité) des sites d’enfouissement constitue un enjeu majeur. Du fait même de sa nature, l’enfouissement laisse peu de traces visibles dès lors que la végétation a repoussé. (…) A plus long terme, la traçabilité parait aussi nécessaire pour toute activité nécessitant de creuser dans le sol : aménagements, construction de nouveaux bâtiments, etc. Il apparaît donc impératif de maintenir non seulement une traçabilité dans le temps des sites d’enfouissement, mais également de signaler très clairement par un affichage bien visible sur site d’éventuelles restrictions d’accès pour raisons sanitaires. »

1 Traitement des cadavres d’animaux non utilisés en boucherie pour en tirer la peau, les os, les graisses, etc.

2 Rapport du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), Décembre 2020

3 Rapport de l’ANSES, Enfouissement de cadavres issus d’animaux d’élevage ou de la faune sauvage, mars 2022.