Loi « Duplomb » : un texte délétère pour le bien-être animal, la santé et l’environnement

Adoptée sans débat par l’Assemblée nationale le 8 juillet 2025, la loi visant à lever les contraintes du métier d’agriculteur, portée par le sénateur Laurent Duplomb, marque un recul historique en matière de protection du bien-être animal et de l’environnement.

Plus de 1,7 million. C’est, au 23 juillet 2025, le nombre de signatures recueillies par une pétition déposée sur le site Internet de l’Assemblée nationale le 10 juillet, deux jours après l’adoption de la « loi Duplomb ». Un chiffre qui dépasse largement le seuil des 500 000 signatures requis pour obtenir un débat en séance publique sur cette pétition.

Cette protestation populaire sans précédent s’explique par les nombreuses craintes que suscite – à juste titre – le texte. Elle ouvre la voie à un possible débat qui n’a pas pu avoir lieu du fait de la motion de rejet votée en mai 2025. Cette motion a en effet permis un vote sans discussion en séance publique à l’Assemblée nationale.

Si la chambre basse accepte d’organiser un débat suite à la pétition, celui-ci ne permettra toutefois pas un réexamen de la loi sur le fond. Et la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, a déclaré qu’un débat « ne pourra en aucun cas revenir sur la loi votée ». En d’autres termes, il n’ouvrirait pas la voie à une abrogation de la loi.

Un texte favorable aux élevages intensifs

Alors que la réautorisation de l’acétamipride, un pesticide dit « tueur d’abeilles » est souvent citée en première intention par les détracteurs de la loi Duplomb, deux autres mesures contenues dans le texte entérinent d’importants reculs en matière de protection du bien-être animal et de l’environnement.

Cette nouvelle loi facilite notamment la construction et l’agrandissement d’élevages intensifs en augmentant le nombre d’animaux à partir duquel une autorisation environnementale est nécessaire pour les exploitations porcines et avicoles sous régime des installations classées pour l’environnement (ICPE).

Auparavant, pour qu’elle soit soumise à autorisation préalable, une exploitation d’élevage de porcs devait compter au minimum 2 000 animaux. Avec la loi Duplomb, si elle est appliquée, ce seuil sera rehaussé à 3 000 animaux, et les exploitations plus petites pourront se contenter d’un simple enregistrement.

Le seuil passera de 750 à 900 animaux pour les truies reproductrices, de 40 000 à 60 000 pour les élevages de poules pondeuses et de 40 000 à 85 000 pour les poulets de chair.

En outre, le texte ouvre la voie à un futur relèvement des seuils pour les élevages bovins.

Ces dispositions correspondent à une demande formulée en février 2025 par les représentants des filières concernées. Quelques jours plus tôt, le syndicat FNSEA s’était déjà attaqué aux modalités de l’instruction des dossiers d’autorisation pour les ICPE lors de l’examen de la loi d’orientation agricole (lire notre article).

Le législateur a ainsi cédé aux sirènes de l’agro-industrie en facilitant l’implantation sur le territoire de très grands élevages intensifs, à contre-courant des demandes des citoyens en matière de respect du bien-être animal : dans ces élevages, les animaux sont en général élevés en bâtiments, à de très fortes densités, le plus souvent sans accès à l’extérieur.

Déni de démocratie

Et pour enfoncer le clou du déni de démocratie dans le cercueil de l’éthique, la loi Duplomb prévoit également, dans le cadre d’une demande d’autorisation, le remplacement des réunions publiques d’information par une simple permanence du commissaire enquêteur en mairie.

De plus, les réponses aux observations du public ne seront plus obligatoires. Il s’agit d’une attaque frontale sur la démocratie locale !

Mais le combat continue ! Trois recours ont été déposés par des parlementaires auprès du Conseil constitutionnel, qui doit se prononcer dans un délai d’un mois. Des recours qui s’appuient notamment sur la Charte de l’environnement de 2005.

Le chemin est encore long avant que la loi soit appliquée

Si les Sages jugent la loi conforme à la Constitution, Emmanuel Macron devrait la promulguer dans un délai de quinze jours. Mais sur le fondement de l’article 10 alinéa 2 de la Constitution, le président de la République peut demander une nouvelle délibération au Parlement avant la promulgation.

Le chef de l’État pourrait aussi ne pas promulguer la loi face à l’ampleur de la mobilisation, mais ce scénario est très peu probable.

Il pourrait en revanche promulguer la loi puis suspendre son application dans l’attente d’un texte l’abrogeant. Là encore, on peut douter d’un tel revirement de la part du Président.

Enfin, des décrets d’application, notamment sur les ICPE, pourront aussi être contestés auprès du juge administratif.

Welfarm s’oppose fermement à la loi Duplomb et appelle à son abrogation. L’association invite tous les Français à signer la pétition déposée sur le site de l’Assemblée nationale.