Le syndicat des entreprises françaises des viandes, Culture Viande, a fait savoir dans un communiqué de presse publié le 8 décembre dernier que le mâle entier serait dévalorisé à l’achat. Une position qui revient à freiner grandement le développement de cette alternative à la castration des porcelets, qui est pourtant la plus respectueuse du bien-être animal !
Les industries de la viande campent sur leur position
Dans leur communiqué de presse du 8 décembre dernier, le syndicat Culture Viande propose que les abattoirs versent une plus-value de 2 centimes par kg de viande aux éleveurs qui continueront de castrer leurs porcelets à partir du 1er janvier 2022. Ce montant de +2cts/kg couvre largement les surcoûts estimés par l’IFIP (environ 0,70€) induits par le recours à l’anesthésie et l’analgésie lors de la castration physique mais pas ceux induits par l’immunovaccination (environ 3€ pour deux injections). Non seulement les éleveurs seront incités à continuer à castrer leurs porcs, mais avec un choix unique : le bistouri !
En parallèle, le syndicat a annoncé son intention de dévaloriser les carcasses de mâles non castrés (mâles entiers) lors de l’achat par l’abattoir avec l’application d’une pénalité de -23 cts/kg. De plus, les carcasses odorantes de mâles entiers1 ne seraient pas dirigées vers les produits destinés à la consommation humaine alors qu’il existe de nombreuses alternatives pour les valoriser.
Avec ce communiqué, l’objectif du syndicat est clair : faire en sorte que les éleveurs poursuivent la castration des porcelets en 2022 et ce, au détriment d’alternatives comme le mâle entier, l’une des seules solutions véritablement respectueuses du bien-être animal.
Le syndicat des entreprises de la viande n’en est pas à sa première déclaration. Le 14 décembre 2020, il avait annoncé son intention de « poursuivre au 1er janvier 2022 la castration des animaux dans le cadre de la loi ». Enfin, le 21 mai dernier, le président de la filière porc du groupe Bigard, membre influent du syndicat Culture Viande, avait prévenu en conférence de presse que « Bigard maintiendra la castration en 2022, pour 100 % des animaux abattus par le groupe »2.
Le mâle entier, une alternative sûre et fiable
Nous vous avions expliqué dans l’an dernier et il y a quelques mois en quoi ces déclarations sont problématiques et en quoi elles s’appuient sur des arguments partiaux, voire tout simplement faux.
D’une part, en détenant 20% du marché de l’abattage et de la découpe des porcs, le groupe Bigard est en passe de devenir le leader sur le marché avec le rachat des abattoirs du groupe Avril. En dominant ainsi le marché, sa position empêche les autres maillons de la chaîne, à savoir les éleveurs de porcs, les autres transformateurs et la grande distribution – qui pour la plupart ne disposent pas de leurs propres outils d’abattage – de se tourner vers l’alternative du mâle entier. Par exemple, malgré un positionnement global favorable aux alternatives à la castration physique, l’entreprise Herta a fait machine arrière en raison de la pression exercée par son fournisseur Socopa (groupe Bigard)3 : le mâle entier, initialement retenu dans la démarche « Engagé et Bon » n’y trouve plus sa place. Ainsi, en s’arc-boutant sur sa position, Bigard menace les engagements pris en faveur des alternatives à la castration physique des porcelets par les autres acteurs de la filière.
D’autre part, il est aujourd’hui aberrant de dévaloriser le mâle entier alors que de nombreux pays européens, dont la France, ont recours à cette alternative depuis plusieurs années. Le mâle entier a prouvé sa fiabilité et le pourcentage de carcasses odorantes est en constante diminution, avec seulement 2% de carcasses odorantes en élevage standard maitrisé (type Cooperl)4. En souhaitant déclasser toutes les carcasses de mâles entiers, le syndicat oublie sciemment que le règlement européen considère seulement les carcasses à odeurs sexuelles prononcées comme impropres à la consommation. La classification des carcasses par les opérateurs dédiés à cette tâche (qualifiés de « nez humains ») ne se fait pas selon une échelle simpliste odorante/ non odorante. Entre ces deux catégories il existe tout un panel de carcasses parfaitement consommables, valorisables par exemple sous forme de plats préparés, produits consommés froids, ou encore dont les flaveurs fortes sont recherchées (andouillettes, tripes…). À travers son interprétation libre de la réglementation européenne pour sa grille de paiement, le syndicat Culture Viande crée une distorsion de concurrence injustifiée sur le marché du porc français, dont les premières victimes sont les animaux et leurs éleveurs.
Le président du syndicat Culture Viande justifie dans le communiqué de presse le maintien de la castration en raison des demandes des consommateurs sur la « qualité organoleptique, technologique et sanitaire des produits mis sur le marché ». Or, comme nous vous l’expliquions dans notre dernier article sur la question, la différence entre les viandes de mâles entiers et de mâles castrés est imperceptible pour les produits issus de mélange (charcuterie cuite, dont le jambon), et peut être même recherchée pour les recettes à base de viande maigre. De plus, pour les produits plus sensibles (cuit par le consommateur) ou dont la transformation nécessite des propriétés particulières (beaucoup de gras qui ne s’oxyde pas), l’immunocastration est une solution sans douleur pour les animaux, bonne pour l’environnement et le portefeuille de l’éleveur. La prétendue demande des consommateurs s’apparente ainsi à un argument fallacieux qui ne justifie en rien les mutilations pratiquées chaque année sur des millions de porcelets.
Aujourd’hui, les attentes du public sont claires : plus que 85% des Français sont défavorables aux mutilations pratiquées sur les porcs, dont la castration5. L’abandon complet et définitif de la castration physique est également l’un des engagements qui a été pris par la filière en 2010 sous la forme d’une déclaration multi-parties intitulée « Déclaration européenne sur les alternatives à la castration chirurgicale des porcelets ». Les signataires européens, au nombre de 34, s’étaient donné pour horizon le 1er janvier 2018 pour faire disparaitre la castration chirurgicale. Fin 2021, force est de constater que la filière est loin d’atteindre le cap qu’elle s’est fixé.
Malgré ces signaux forts vers la fin des mutilations, il semblerait que le syndicat Culture Viande et le groupe Bigard n’aient toujours pas reçu le message… À nous de le leur rappeler !
POUR SOUTENIR LES ALTERNATIVES À LA CASTRATION DES PORCELETS, SIGNEZ LA PÉTITION DE NOTRE CAMPAGNE #StopCastration
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