Transport d’animaux d’élevage : l’application TruckAlert met en lumière les lacunes réglementaires

Depuis son lancement par Welfarm il y a trois ans, l’application TruckAlert a permis de signaler 437 camions transportant des animaux d’élevage par plus de 30 °C, en infraction avec la réglementation en vigueur. Des données sur lesquelles l’association s’est basée pour développer les arguments avancés dans plusieurs courriers adressés à deux ministres français et à deux commissaires européens, afin de demander une révision de la législation en vigueur.

cochon dans camion
© Welfarm

Pour agir face aux nombreux décès d’animaux d’élevage durant leur transport en raison de fortes chaleurs, l’association Welfarm a lancé, en juillet 2020, l’application TruckAlert, qui permet de signaler les transports d’animaux vivants par plus de 30 °C (disponible gratuitement sur l’AppStore et le PlayStore).

Un an plus tôt, sous la pression des associations de protection animale, le ministre de l’Agriculture d’alors, Didier Guillaume, prenait un arrêté destiné à limiter les transports d’animaux durant la canicule dans le cadre du Plan national d’adaptation au changement climatique. Le texte interdit, sauf exceptions, le transport de certains animaux entre 13 heures et 18 heures dans les départements placés en vigilance canicule orange ou rouge par Météo France la veille du départ.

Plage horaire arbitraire

Depuis son lancement, TruckAlert a permis de signaler 437 camions en infraction à cette réglementation. Une preuve de l’inefficacité d’une mesure par ailleurs largement insuffisante. En effet, sur ces 437 signalements, 176 concernaient des transports par plus de 30 °C de minuit à 13 heures et de 18 heures à minuit. La tranche horaire retenue par l’arrêté du 22 juillet 2019 n’est donc pas pertinente pour protéger efficacement les animaux en cas de fortes chaleurs.

Malgré son inefficacité, cette mesure a été présentée dans le cadre de l’élaboration du nouveau Plan national d’adaptation au changement climatique. Welfarm a donc décidé d’attirer l’attention du ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, sur ce point, dans une lettre ouverte publiée le 3 juillet dernier, cosignée par la fédération d’associations France Nature Environnement.

Une lettre étayée par les signalements recueillis par TruckAlert et dans laquelle Welfarm précise que « la préparation à un scénario de réchauffement à plus 4 °C d’ici la fin du siècle nécessite d’envisager une adaptation transformationnelle, entendue comme une modification profonde et structurelle exigeant la reconfiguration des systèmes d’élevage et de transport des animaux ».

Réglementation lacunaire

Welfarm a également adressé le 20 juillet un compte rendu des résultats de TruckAlert au ministre de l’Agriculture et de la souveraineté alimentaire, Marc Fesneau, ainsi qu’aux commissaires européens à l’Agriculture, Janusz Wojciechowski, et à la Santé et Sécurité alimentaire, Stella Kyriakides. Compte rendu accompagné d’un courrier rappelant les demandes de l’association :

  • au ministre de l’Agriculture, le priant de : 
    « soutenir au niveau européen l’adoption d’un nouveau règlement européen applicable au transport d’animaux vivants, ambitieux et à même d’adapter suffisamment le transport d’animaux en période de fortes chaleurs ». Welfarm souhaite que ce nouveau texte rende impératives les recommandations de l’Autorité européenne de sécurité des aliments, pour qui la température à l’intérieur des camions ne devrait jamais excéder celle que les animaux sont susceptibles de supporter (ex. : 25 °C pour les bovins) ;
    – prendre de toute urgence les mesures nécessaires et d’adopter les arrêtés ou décrets requis pour garantir l’efficacité du règlement européen actuel ;
  • aux deux commissaires européens, concernant l’adoption prochaine du futur règlement sur le transport d’animaux vivants, de :
    – faire en sorte que la tolérance de + ou – 5 °C à l’interdiction de transport par plus de 30 °C prévue dans le règlement européen actuel, qui fait objet actuellement de conduites abusives de la part de certains transporteurs, soit supprimée ou, au minimum, devienne une réelle exception s’inscrivant dans un cadre bien défini ;
    – rendre impératives les recommandations de l’Autorité européenne de sécurité des aliments, pour qui la température à l’intérieur des camions ne devrait jamais excéder celle que les animaux sont susceptibles de supporter en fonction des espèces ;
    – réévaluer les densités de chargement autorisées dans les camions ;
    – harmoniser l’application du règlement européen applicable au transport d’animaux au sein des États membres. Les disparités actuelles encouragent en effet un nivellement par le bas des normes applicables ;
    – interdire sans délai les exportations d’animaux vivants vers les pays tiers (hors UE).