Révision de la législation européenne sur le bien-être animal : rien n’est encore gagné

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Le 26 octobre dernier, nous vous alertions sur la publication du rapport d’exécution relatif au bien-être des animaux sur les exploitations pour la mise en œuvre de la législation européenne sur le bien-être animal, adopté par la commission sur l’Agriculture et le Développement rural du Parlement européen. Ce mardi 15 février 2022, il a été adopté en session plénière par le Parlement européen.

Or, ce rapport, qui a pour rapporteur Jérémy Decerle, député européen français (Renew), est très problématique pour plusieurs raisons.

Alors que l’objet de ce rapport est censé porter sur le bien-être des animaux d’élevage, il s’intéresse essentiellement aux contraintes supposées qu’un durcissement des normes infligerait aux éleveurs, en fondant ses conclusions sur l’importance des moyens financiers qu’une telle évolution susciterait. Le rapport défend ainsi l’adoption de normes faiblement protectrices du bien-être animal au profit de ce qu’il considère être une législation « techniquement réaliste ». S’il faut bien entendu soutenir les éleveurs dans leur transition vers des pratiques plus respectueuses du bien-être animal, les normes de protection animale devraient en priorité se baser sur les besoins des animaux.

Alors que la Commission européenne annonçait le 30 juin dernier son intention d’élaborer des propositions législatives à même d’interdire enfin les cages pour certains animaux au sein de l’Union européenne, ce rapport s’oppose par exemple à l’installation de « systèmes d’hébergement fondés sur une mise bas entièrement libre » ainsi qu’à la « brusque suppression des cages ». Comment imaginer une révision ambitieuse de la législation dans de telles conditions ?

Le rapport présente de nombreuses autres limites. À titre d’illustration, il considère également qu’il devrait être facultatif de renseigner les consommateurs sur les méthodes d’élevage dont sont issus les produits d’origine animale qu’ils acquièrent. Welfarm défend pourtant un étiquetage obligatoire : nous estimons qu’il est indispensable d’informer tous les consommateurs des conditions dans lesquelles les animaux sont élevés, transportés et abattus. Le rapport défend également la production de foie gras, considérant qu’elle « repose sur des procédures d’élevage respectueuses des critères de bien-être animal ». Or, le gavage des animaux pour produire du foie gras est une pratique extrêmement violente, contraire aux fondamentaux du bien-être animal !

LE VOTE DU PARLEMENT EUROPÉEN : UNE NOUVELLE DÉCEPTION

Le rapport d’exécution de Jérémy Decerle était soumis au vote de l’ensemble des députés du Parlement européen réunis en session plénière ce mardi 15 février. Il s’agissait de l’ultime occasion pour le Parlement européen de rejeter ce rapport, ainsi que le demandait Welfarm. Afin qu’une révision ambitieuse des normes européennes voie enfin le jour, il était indispensable en effet que la résolution du 20 octobre dernier qui prenait appui sur le rapport progressiste d’Anja Hazekamp (GUE/NGL) soit en rien altérée. Malheureusement, le rapport a été adopté à une large majorité.

En session plénière, les principaux groupes du Parlement européen (Alliance progressiste des socialistes et démocrates au Parlement européen, Renaissance Europe, le Groupe du Parti populaire européen, Identité et Démocratie) se sont succédé pour défendre ce rapport inepte. Welfarm regrette que, dans la majorité des interventions de ces eurodéputés, le bien-être animal ait été relégué au second plan, voire complètement oublié, derrière la question du soutien financier aux éleveurs indépendamment de leurs pratiques vis-à-vis des animaux.

Les alternatives à ce rapport ne manquaient pourtant pas ! Welfarm salue la résolution alternative bien plus ambitieuse portée notamment par la députée européenne Anja Hazekamp (GUE/NL).  Certains amendements proposés également par le Groupe des Verts étaient bienvenus et auraient pu améliorer le texte initial : l’un d’eux demandait en particulier l’interdiction du gavage des canards et des oies pour la production de foie gras et un autre invitait les États membres de l’UE à interdire le gazage des poussins et canetons. Tous ces amendements ont malheureusement été rejetés. Nous saluons par ailleurs les interventions des députés appartenant à ces groupes lors du débat en plénière pour recentrer le débat sur les conditions de vie des animaux.