Performance extra-financière : les entreprises à la traîne sur le bien-être animal

Depuis 2018, les entreprises tenues de publier une déclaration de performance extra-financière ont l’obligation d’y intégrer des critères de bien-être animal. Depuis 2023, Welfarm dresse un bilan du respect de cette obligation, et vient de publier la seconde édition de son rapport sur le sujet.

Welfarm a publié en octobre 2024 la seconde édition de son rapport sur l’intégration d’informations relatives au respect du bien-être animal dans les déclarations de performances extra-financières des entreprises (DPEF, rapport consultable en fin d’article).

L’association a obtenu en 2018 le dépôt d’un amendement à l’article L.225-102-1 du Code du commerce issu de la loi Egalim qui contraint les entreprises à intégrer le bien-être animal dans leurs comptes rendus d’impact social et environnemental.

Convaincue que ce texte de loi est un outil essentiel pour renforcer l’intérêt porté au bien-être animal, Welfarm a voulu dresser fin 2023 un premier bilan portant sur la mise en œuvre de cette obligation afin de s’assurer que les sociétés s’en saisissent correctement. Et nous avons répété l’exercice en 2024.

Nous avons, pour cette édition du rapport, identifié 134 sociétés ayant publié un document librement accessible qui recense les informations extra-financières liées à leur activité.

Evidemment, le nombre de sociétés concernées par cette obligation de DPEF est bien plus élevé, mais cette nouvelle édition du rapport permet de dresser un constat significatif des principales tendances de la mise en œuvre du volet bien-être animal de l’article L.225-102-1 du Code du commerce.

Quelques bons élèves

Seules 37 des 134 sociétés passées au radar indiquent être attentives au respect du bien-être animal dans leur processus de production, soit 27,6 % des entreprises analysées.

Parmi elles, on peut citer le groupe coopératif Agrial, dont la DPEF 2023 indique que le groupe est engagé en faveur du bien-être animal, et se base sur les cinq libertés fondamentales de l’animal d’élevage. Plus de 95 % des éleveurs bovins et caprins de la coopérative sont labellisés dans ce cadre, et 83 % des œufs produits sont issus d’élevages plein air, label Rouge, bio ou autre cahier des charges.

Du côté de Carrefour, la DPEF 2023 indique que 100 % des œufs frais commercialisés par le groupe seront issus d’élevage sans cage d’ici à 2025. Carrefour a en outre défini une politique de bien-être animal autour de dix priorités partagées avec les acteurs des filières concernées, par exemple transformer l’élevage en cage et restreindre le confinement des animaux, ou encore minimiser le stress pendant le transport et au moment de l’abattage.

72,4 % des entreprises ne respectent pas la loi

83 sociétés ont explicitement exclu le respect du bien-être animal des thématiques traitées dans leur rapport, au motif que les risques ne seraient pas pertinents au regard de leur activité, ce qui correspond à 61,9 % des entreprises analysées.

14 n’ont fait aucune référence au bien-être animal dans leur rapport, soit 10,5 % des sociétés analysées.

On constate, malheureusement, que de nombreuses entreprises – 72,4 % – ne satisfont pas l’obligation d’intégration du bien-être animal dans leurs rapports de performance extra-financière. Un argument souvent avancé par les sociétés concernées est que le bien-être animal ne constitue pas un risque pertinent au regard de leurs activités, ce que Welfarm déplore.

Nous pensons que toutes les entreprises, quel que soit leur secteur d’activité, peuvent avoir un impact sur le bien-être animal, par exemple en intégrant des critères de respect du bien-être animal dans les approvisionnements des restaurants d’entreprise.

Manque de transparence

Une fois encore, nous avons relevé un désintérêt global des entreprises pour la délivrance d’informations sur le bien-être animal.

Welfarm déplore ce manque de transparence des entreprises et va activer les leviers dont elle dispose afin de redonner de l’effectivité à cette obligation. L’intégration de critères de bien-être animal dans les rapports de performance extra-financière des entreprises doit devenir systématique, afin de protéger efficacement l’ensemble des animaux impliqués dans les processus de production des entreprises, de manière directe ou indirecte.

Nous allons suivre ce dossier de près et envisageons de publier un nouveau rapport chaque année sur le sujet, d’autant que le nombre d’entreprises soumises à l’obligation de déclaration de performance va augmenter.

Plus d’entreprises concernées à l’avenir

Au niveau européen, la directive CSRD sur le reporting de la durabilité des entreprises impose désormais la publication d’informations sur le bien-être animal, ce qui n’était pas le cas auparavant.

Actuellement, au sein de l’UE, 11 700 entreprises seraient soumises à la publication d’informations extra-financières au sein de l’UE. Ce nombre devrait passer à 50 000 avec l’adoption du nouveau texte.

Les seuils d’application envisagés dans le nouveau texte sont plus larges que ceux de l’article L.225-102-1 du Code de commerce pour la France, ce qui signifie que le nombre d’entreprises françaises concernées par l’obligation de publication d’informations extra-financières – évalué à 3 800 au 17 mars 2021 – augmentera quand cette directive sera appliquée.