L’abattoir mobile, un outil pour réduire les souffrances des animaux 

Transport, nouvel environnement, présence d’animaux inconnus, multiples manipulations… L’abattage est une source de stress et de souffrance pour l’animal. Une alternative s’est développée ces dernières années en France : l’abattoir mobile. Welfarm, membre du Comité de suivi et d’évaluation de l’expérimentation de dispositifs d’abattoirs mobiles1, passe en revue les tenants et aboutissants de cette pratique.

Retour sur les étapes de la procédure d’abattage

Après le transport jusqu’à l’abattoir, le déchargement et la réception des animaux, le processus d’abattage peut être divisé en quatre grandes étapes : la stabulation, l’amenée, l’étourdissement et la saignée.

Stabulation. Avant d’être menés à la zone d’abattage, les animaux peuvent subir une attente plus ou moins prolongée. Cette attente se fait dans la zone de stabulation. Il s’agit d’un espace de repos qui doit permettre à l’animal de se reposer, de s’abreuver, voire d’être alimenté.

Manipulation et amenée en zone d’abattage. A différente étape dans la vie de l’animal au sein de l’abattoir, celui-ci est manipulé par un membre du personnel qui lui est inconnu. Cette étape, si elle n’est pas réalisée correctement, provoque du stress et de la peur chez les animaux.

Après l’amenée en zone d’abattage, l’animal est immobilisé. L’immobilisation est également une étape stressante pour les animaux qui se sentent dans l’impossibilité de fuir une situation anxiogène et qui éprouvent donc un stress intense ainsi qu’une sensation de peur.

Étourdissement. Il s’agit de tout procédé (étourdissement électrique, mécanique ou au gaz) qui provoque une perte de conscience et de sensibilité. Cette étape permet ensuite de procéder à la saignée sur des animaux qui n’éprouvent pas de peur ou de souffrance.

Saignée. Processus qui cause la mort de l’animal en le vidant progressivement de son sang. Le cerveau cesse alors d’être alimenté par les principales artères qui ont été incisées.

La loi « EGalim » ouvre la voie aux abattoirs mobiles

Selon le ministère de l’Agriculture, il existe 234 abattoirs de boucherie (bovins, ovins, caprins, porcins, équins) en France. Ils étaient un millier dans les années 1970. Conséquence : les bêtes parcourent bien souvent des centaines de kilomètres, entassées dans des camions, avant d’être abattues à des cadences industrielles. L’article 73 de la loi Egalim de 2018 a ouvert la voie à la mise en place de l’expérimentation de l’abattage mobile en France2.

Un seul abattoir mobile actuellement en fonction en France

A l’heure actuelle, un seul opérateur pratique l’abattage mobile en France, qui a profité de l’expérimentation permise par la loi Egalim : Le Bœuf éthique3. Une quarantaine d’éleveurs ont adhéré au concept. Tous s’engagent à respecter un pacte éthique garantissant, entre autres, que les animaux ont accès aux pâturages, sont nourris d’herbes et d’aliments naturels et ne reçoivent pas d’antibiotiques4.

Comment fonctionne cet abattoir mobile ?

L’abattoir mobile du Bœuf éthique permet la mise à mort sur le site d’élevage. Il s’agit d’une structure modulable et transportable qui se déplace de ferme en ferme sous la forme de trois camions mobiles. Ce système dispose de l’infrastructure nécessaire à l’abattage des animaux et au conditionnement des carcasses. Les carcasses sont ensuite envoyées dans un atelier de découpe et de préparation des commandes. Cinq opérateurs assurent le fonctionnement de l’abattoir.

Photo issue du compte-rendu de la Commission d’enquête sur les conditions d’abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français, 2016. Dans son champ de vision, l’animal voit ce qu’il pense être un accès qui donne vers son environnement et ses congénères, il est donc moins hésitant à avancer vers le dispositif. Une fois le poste d’abattage atteint, la grille arrière se lève empêchant l’animal d’aller plus loin. Celui-ci est immédiatement étourdi par l’opérateur.

Quels sont les principaux avantages de cet abattoir ?

Pas de transport. Ce qui évite le stress inhérent au chargement, déchargement et au transport proprement dit.

Maintien de l’animal dans un environnement familier jusqu’à sa mort. L’animal demeure dans son lieu de vie habituel, dans un environnement physique connu (hormis l’entrée dans la structure d’abattage proprement dite) : configuration des lieux, bruits, odeurs…

Maintien de l’animal dans un environnement social connu. L’animal reste en contact visuel et/ou auditif et olfactif avec des congénères familiers. L’abattage sur l’exploitation évite ainsi les risques d’interactions agressives, et donc de blessures.

Présence apaisante de l’éleveur.  Même si l’animal reste manipulé par des personnes inconnues, la présence de l’éleveur sur place peut faciliter l’amenée de l’animal vers la zone d’étourdissement.

Faible cadence d’abattage. Cette faible cadence limite potentiellement les erreurs de manipulation et permet de prendre le temps de bien effectuer les vérifications de perte de conscience après étourdissement. Au moment du lancement officiel de l’abattoir, en septembre 2021, la capacité d’abattage était de quatre bêtes par jour.

Globalement la mise à mort dans un abattoir mobile sur le site d’élevage réduit le nombre de facteurs de stress et les risques de blessures comparativement à l’abattage en système conventionnel. Une étude norvégienne5 sur des agneaux a montré que la sécrétion de cortisol (hormones dites « de stress ») était significativement moins élevée dans un système mobile comparé à un système fixe.

1 Welfarm est également membre du Comité national d’éthique des abattoirs (CNEAB)

2 Article73 Loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous : « À titre expérimental et pour une durée de quatre ans à compter de la publication du décret prévu au dernier alinéa du présent article, des dispositifs d’abattoirs mobiles sont expérimentés dans l’objectif d’identifier les éventuelles difficultés d’application de la réglementation européenne. L’expérimentation fait l’objet d’une évaluation, notamment de sa viabilité économique et de son impact sur le bien-être animal, dont les résultats sont transmis au Parlement au plus tard six mois avant son terme.»

3 https://www.leboeufethique.fr/pages/labattoir-mobile

4 https://www.bourgognefranchecomte.fr/elle-cree-le-premier-abattoir-mobile-de-france#:~:text=R%C3%A9volt%C3%A9e%20par%20les%20conditions%20d,’abattage%20dignes%2C%20%C3%A0%20domicile.

5 Marit Skog Eriksen et al, 2013: Mobile abattoir versus conventional slaughterhouse—Impact on stress parameters and meat quality characteristics in Norwegian lambs.