Après des campagnes médiatiques, un recours judiciaire, Welfarm poursuit son combat contre les souffrances infligées aux juments gestantes pour la production de l’hormone de fertilité eCG. Welfarm, aux côtés d’autres ONG, a écrit le 16 mai une lettre ouverte à la Commission européenne pour réclamer l’interdiction de la production, de l’importation et de l’utilisation de cette hormone au sein de l’Union européenne.
Qu’est-ce que l’hormone eCG ?
La gonadotrophine chorionique équine (couramment abrégée en eCG, de l’anglais equine chorionic gonadotropin) est une hormone de fertilité que les juments produisent naturellement lors de leur gestation. En France et dans l’Union européenne (UE), l’eCG est utilisée en élevages porcins, ovins, bovins, caprins etc., dans le but de déclencher et/ou synchroniser la période d’ovulation des femelles.
Dans quelles conditions est produite l’hormone eCG ?
L’hormone eCG est produite dans des « fermes à sang ». Dans des boxes de contention, des juments gestantes sont immobilisées puis elles sont saignées, via une canule posée dans leur veine jugulaire. L’opération dure une dizaine de minutes, le temps de leur prélever plusieurs litres de sang (15% du volume total) au mépris de leur santé pendant plusieurs mois. Violences subies, conditions d’hygiène, juments fertilisées puis avortées… La liste des abus est longue.
Un combat soutenu par Welfarm depuis des années
En 2018 et en 2021, Welfam a relayé des campagnes rendant compte du calvaire vécu par les juments dans des fermes à sang en Argentine et en Uruguay ainsi qu’en Islande. En mars dernier, Welfarm a soutenu le recours juridique de l’ONG Animal Welfare Foundation | Tierschutzbund Zürich (AWF|TSB) contre l’Islande. L’île nordique, membre de l’Association européenne de libre-échange (AELE) et donc intégrée à l’Espace économique européen (EEE), est contrainte à ce titre de respecter la législation européenne même sans être membre de l’UE. Si le non-respect de cette législation est avéré, la voie sera ouverte à l’interdiction de la production d’hormone eCG sur le sol islandais.
Lettre ouverte à la Commission européenne
Dans une lettre ouverte adressée à la Commission européenne datée du 16 mai, plusieurs ONG, dont Welfarm, regrettent que la Commission ne donne pas suite à l’appel lancé le 20 octobre 2021 par le Parlement européen (PE) pour une interdiction de l’importation et de la production d’hormone eCG1.
Dans cette même lettre, les ONG proposent des alternatives à la Commission qui ne passent pas par une interdiction formelle et générale de l’hormone eCG dans l’UE.
Premièrement, la Commission doit reconnaître que la production d’hormone eCG sur le sol européen viole les règles de l’UE, à savoir la directive 2010/63/UE relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques2. Elle pourrait également profiter de la révision des règles de l’UE en matière de bien-être animal pour interdire l’utilisation de l’eCG.
Deuxièmement, la Commission doit veiller à ce que la directive 2010/63/UE susmentionnée soit prise en compte dans le nouveau règlement de l’UE sur les médicaments vétérinaires3. Ce dernier impose l’inclusion du bien-être animal dans les bonnes pratiques de fabrication (BPF) auxquelles doivent se conformer les exportateurs.
Plusieurs États membres de l’UE, à l’image de l’Autriche et du Danemark, ont déjà exprimé leur soutien à l’appel du PE. Aux Pays-Bas, le Parlement a récemment adopté une motion demandant une interdiction européenne de la production et de l’importation d’hormone eCG dès que possible4. Il est temps que la Commission européenne, détentrice de l’initiative législative au sein de l’UE, se positionne clairement sur le dossier afin de mettre un terme à une pratique totalement incompatible avec le bien-être animal et qui entraîne de terribles souffrances pour les juments, quel que soit le pays où elle est organisée.
Des alternatives existent
Dans le cas de l’hormone eCG, il existe des alternatives disponibles pour les éleveurs, notamment des hormones synthétiques. L’induction et la synchronisation des cycles de chaleurs chez les animaux d’élevage est également possible avec des méthodes sans hormone, appelées mesures zootechniques, Par exemple, « l’effet mâle » consiste à introduire des mâles dans l’environnement des femelles afin de stimuler l’activité ovarienne de celles-ci.
Bien que des produits alternatifs synthétiques soient déjà sur le marché européen, Welfarm s’oppose d’une manière générale au recours systématique à des hormones de fertilité en élevage. L’ONG en appelle aux pouvoirs publics afin qu’ils financent des formations à destination des éleveurs et vétérinaires pour qu’ils puissent mettre en œuvre des mesures zootechniques qui permettent de mettre fin à l’utilisation de l’hormone eCG.
1 Dans sa résolution du 20 octobre 2021 sur une stratégie «De la ferme à la table», le Parlement européen « rappelle que les expérimentations animales structurelles qui ne sont pas indispensables n’ont pas leur place dans la chaîne alimentaire, la directive 2010/63/UE prescrivant le remplacement et la réduction du recours aux animaux dans les procédures; exhorte la Commission et les États membres à mettre un terme à l’importation et à la production dans l’Union de gonadotrophine extraite du sérum de jument gravide, laquelle est extraite du sang de juments gravides systématiquement fécondées et soumises à des prélèvements sanguins, ce qui engendre des problèmes de santé et de bien-être ».
2 Directive 2010/63/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2010 relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques.
3 Règlement (UE) 2019/6 du Parlement européen et du Conseil : « Les bonnes pratiques de fabrication aux fins du présent règlement devraient tenir compte des normes de l’Union et des normes internationales en matière de bien-être des animaux lorsque des substances actives sont préparées à partir d’animaux. »